Entre Vinci et l'Etat, le réalisme ne peut que prévaloir - DJ Plus
18 Januar 2018 - 4:08PM
Bourse Web Dow Jones (French)
Guillaume Bayre,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le choix du gouvernement français
d'abandonner le projet de transfert de l'aéroport de Nantes sur la
commune de Notre-Dame-des-Landes n'a pas manqué de susciter une
cascade de réactions, plus ou moins sincères, au sein du microcosme
politique. Par contraste, les marchés financiers sont restés de
marbre à l'annonce du Premier ministre mercredi après-midi. Vinci
(DG.FR), désigné attributaire du contrat du nouvel aéroport au
début de la décennie, a terminé la séance sur un repli insignifiant
de 0,14%, en ligne avec un déclin de 0,36% de l'indice phare.
Jusqu'ici, pas de perspectives concrètes à valoriser
Faute de perspectives claires, le marché n'avait pas tout
simplement pas intégré le projet Notre-Dame-des-Landes dans la
valorisation du géant français des travaux publics et des
concessions. Essentiellement, parce qu'en dehors du chiffrage du
coût envisagé aucun "business plan" n'a jamais été présenté, note
Eric Lemarié, analyste chez Bryan Garnier. Le cours de Vinci
n'intégrait donc ni les investissements liés au démarrage du
chantier ni les hypothétiques cash-flows à venir.
Compte tenu de l'inaction des précédents gouvernements, voilà des
années que chacun avait pris acte du blocage pur et simple de la
situation, ne laissant guère d'illusions à Vinci quant à la
matérialité de l'accord signé en 2010, en principe pour 55 ans, et
libre de tout recours depuis 2012.
Le choix de tourner la page
L'arbitrage rendu par Edouard Philippe, en choisissant de
développer l'actuel aéroport nantais plutôt que d'en construire un
nouveau, permet enfin de sortir le dossier de l'impasse, ce qui ne
peut que bénéficier à toutes les parties prenantes. Eric Lemarié
considère que la décision du gouvernement "offre enfin à Vinci une
opportunité d'avancer : le scénario le plus probable serait de
renégocier le contrat de concession de façon à prendre en compte
les investissements à réaliser sur l'aéroport existant, et tourner
la page". Réitérant son avis neutre sur Vinci en Bourse, dans la
mesure où il estime la juste valeur du titre à 80 euros - un peu en
deçà du cours actuel - Bryan Garnier considère cependant que le
groupe dispose d'arguments solides pour négocier un amendement au
contrat de concession de Nantes-Atlantique, opéré via sa filiale à
85% Aéroports du Grand Ouest.
L'indemnisation reste à définir
Une éventuelle indemnisation en faveur de Vinci du fait de la
résiliation du contrat Notre-Dame-des-Landes reste en suspens. Le
groupe s'est dit à la disposition du gouvernement pour tirer au
clair les modalités de l'arrêt du projet, son PDG Xavier Huillard
précisant que le gouvernement l'avait assuré ne pas chercher de
clauses permettant de priver l'entreprise d'indemnités. Pour
autant, Vinci s'est bien gardé de réclamer quelque montant à ce
stade. Comme tout contrat de ce type, l'accord prévoit bel et bien
une compensation, en partie assise sur l'actualisation des
cash-flows attendus, explique l'analyste de Bryan Garnier. Mais la
formule retenue ne permet pas de la calculer directement,
précise-t-il.
Le tropisme tricolore de Vinci
Tout porte donc à croire que les conditions financières de
l'abandon du projet de nouvel aéroport dépendront essentiellement
de négociations entre Vinci et la puissance publique, en fonction
aussi des besoins de mise à niveau de l'aéroport actuel. D'une
façon ou d'une autre, le groupe est beaucoup trop dépendant de
l'économie française pour faire valoir des exigences démesurées. En
2016, Vinci réalisait encore 59% de son chiffre d'affaires en
France. En outre, il tire la plus grande part de ses bénéfices de
sa branche concession : 70% des profits, pour seulement 16,5% des
revenus. Fatalement, le concessionnaire ne peut envisager de
relations conflictuelles avec l'Etat qui risqueraient d'influencer
cette activité rémunératrice, liée à l'exploitation
d'infrastructures publiques ou semi-publiques : aéroports, ouvrages
d'art, lignes ferroviaires et bien sûr autoroutes.
La privatisation d'ADP en ligne de mire
Ceci d'autant moins que l'Etat français soupèse actuellement
l'opportunité de céder sa participation dans Aéroports de Paris
(ADP.FR). Selon Deutsche Bank, l'intégration d'ADP porterait la
contribution des aéroports à 30% de l'excédent brut d'exploitation
du groupe, contre 12% actuellement. Une telle transaction
constituerait une utilisation intéressante de la trésorerie amassée
par Vinci, estime la banque allemande, qui note que l'opération
aurait un effet relutif immédiat sur le bénéfice par action.
"S'il y a une opportunité sur ADP, on essaiera de jouer un rôle",
avait reconnu cet été Xavier Huillard, se disant intéressé par
l'intégralité du capital du groupe, contre une participation
limitée à 8% aujourd'hui. Avec un tel enjeu, Vinci ne peut que
maintenir une attitude constructive vis-à-vis de l'Etat.
Après la décision d'abandonner "NDDL", le réalisme devrait
continuer à prévaloir.
-Guillaume Bayre, Agefi-Dow Jones ; 01 41 27 47 93 ;
gbayre@agefi.fr ; ed : ECH
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January 18, 2018 09:48 ET (14:48 GMT)
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