Nanobiotix offre un succès bienvenu pour relancer les biotechs tricolores - DJ Plus
22 Juni 2018 - 2:29PM
Bourse Web Dow Jones (French)
Guillaume Bayre,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les actionnaires des entreprises
françaises de biotechnologie ont souvent été mal récompensés. Une
série de déceptions des représentants les plus en vue a plombé la
performance globale du secteur, au grand dam d'investisseurs
parfois mal avertis des risques. Les résultats spectaculaires
publiés jeudi soir par Nanobiotix, qui développe un traitement de
rupture contre le cancer, pourraient ouvrir une période plus
propice. Sans dispenser pour autant les investisseurs de faire
preuve de discernement.
Si l'indice Next Biotech gagne 37% sur un an, cette performance est
d'abord due aux valeurs néerlandaises et belges. Cet indice
réunissant 50 biotechs cotées sur les marchés paneuropéen
d'Euronext a bénéficié de l'OPA de Sanofi sur Ablynx et de celle de
Takeda sur TiGenix, ainsi que de la bonne performance d'entreprises
déjà au stade commercial comme Pharming et Mithra, remarque
Christophe Dombu, analyste en charge de la biotech chez Portzamparc
(BNP Paribas). La variation moyenne des biotechs françaises reste
quant à elle sensiblement négative à ce jour. "Les accidents de
parcours ont été nombreux au cours des derniers trimestres :
déceptions sur DBV Technologies et Innate, ainsi chez Adocia, AB
Sciences, GeNeuro, Onxeo... ce qui a installé un sentiment de
méfiance", ajoute le spécialiste.
"L'an dernier, notre positionnement européen nous a été propice
puisque c'est principalement grâce à nos investissements sur les
néerlandais Argen-X et Pharming et sur l'allemand Evotec, que la
performance de notre fonds a été positive", remarque pour sa part
Marc Le Bozec, gérant de Pluvalca Biotech à la Financière Arbevel.
"Nous avions aussi misé sur AAA, une entreprise française cotée au
Nasdaq, rachetée par Novartis", précise-t-il.
Malgré les déceptions sur le SBF 120, Paris brille
La sanction a été d'autant plus cuisante pour des biotechs
française dont la capitalisation leur avait ouvert le SBF 120. Le
spécialiste du traitement des allergies alimentaires DBV a chuté de
57% depuis l'annonce en octobre d'une phase 3 positive mais
insuffisamment concluante sur Viaskin Peanut. Pour Innate Pharma,
l'échec en novembre de son traitement lirilumab combiné à l'Opdivo
de Bristol-Myers Squibb pour traiter le cancer de la tête et du cou
a sonné le glas du partenariat avec le laboratoire américain. En
baisse de plus de 40%, l'entreprise marseillaise a été exclue de
l'indice large. Quant à Genfit, sa capitalisation a fondu de moitié
depuis les résultats de la phase 2b de son composé phare
élafibranor, où le critère principal d'efficacité n'avait pas été
atteint à un niveau jugé statistiquement significatif.
En dépit des accidents survenus ces dernières années, le secteur de
la biotech tricolore connaît toutefois sur la durée une progression
considérable du nombre et de la capitalisation des entreprises
cotées, nuance Alexandre Regniault, avocat associé en charge du
secteur santé et sciences de la vie au cabinet Simmons &
Simmons. "Avec plus de 60 biotechs cotées, Paris reste la première
place européenne pour le secteur et la deuxième dans le monde, même
s'il reste des freins à lever", indique-t-il. Par rapport à New
York, la place parisienne ne bénéficie pas de la même disponibilité
de capitaux. "Il existe aussi un enjeu culturel d'appétence pour le
risque et ce sur des montants importants, compte tenu de la durée
et des coûts incompressibles de développement de thérapies
nouvelles, avec un taux d'échec important", note Alexandre
Regniault. "Il existe une imprévisibilité inhérente au secteur,
liée au fait qu'il faut des centaines de molécules candidates au
départ pour aboutir à un seul médicament sur le marché. Dès lors,
l'échec est consubstantiel au fait de développer un médicament. Les
investisseurs doivent s'y préparer et être capables d'adopter une
vision de très long terme."
Pour Marc Le Bozec, le marasme du segment français l'an dernier
apparaît avant tout conjoncturel. "L'alignement des astres a été
tout simplement exécrable. Pour prendre l'exemple emblématique de
DBV, il n'y a pas de doute que le produit fonctionne et présente un
profil de sécurité avantageux sur son concurrent. Le marché a très
fortement réagi - on observe d'ailleurs une asymétrie des réactions
entre mauvaises et bonnes nouvelles - mais il serait surprenant que
Viaskin ne soit pas homologué". "C'est une industrie qu'il ne faut
pas regarder sur une seule valeur et sur quelques mois : l'horizon
c'est cinq ans au moins, et à cette échelle la France a beaucoup
d'atouts pour confirmer sa position forte en Europe", souligne le
responsable.
Nanobiotix a évité de "survendre" son projet
L'annonce de Nanobiotix, qui a enregistré un taux de réponses
complètes - correspondant à une quasi-disparition des cellules
cancéreuses dans la tumeur - deux fois plus important chez les
patients traités avec NBTXR3 que chez ceux traités par
radiothérapie seule (16,1% à comparer à 7,9%), apparaît plus
qu'encourageante après la série noire de l'an dernier. Le titre
gagnait plus de 50% vendredi matin. "C'est une excellente nouvelle,
l'essai ayant également montré que la technologie de Nanobiotix
peut rendre opérables certaines tumeurs inopérables avec les
technologies actuelles en raison de leur taille. C'est la première
fois qu'une technologie de ce type, fondée sur des nanoparticules
capables d'améliorer localement l'action des rayons X, démontre son
efficacité clinique", salue Christophe Dombu. Cette nouvelle est à
la fois "très positive, compte tenu de l'efficacité spectaculaire
du traitement, et plutôt inattendue car la société s'était montrée
assez prudente en matière de communication. En évitant de survendre
son projet, cette jeune société a fait preuve d'une belle
maturité", ajoute Marc Le Bozec.
Nanobiotix apporte ainsi un succès le succès en phase finale
d'essais qui a tant manqué au secteur ces derniers temps.
L'entreprise pourrait continuer à alimenter l'intérêt avec de
résultats dans d'autres indications comme le cancer de la tête et
du cou, un marché plus important encore que le sarcome des tissus
mous. "Il y aura encore beaucoup de belles histoires dans la
biotech française, l'exemple de Nanobiotix arrive à temps pour le
démontrer", assure le gérant.
Le décollage boursier de la société dirigée par Laurent Levy
constitue un signal fort pour le secteur. Les investisseurs peuvent
tirer une autre leçon de cette envolée : de solides résultats
cliniques ne sont pas forcément l'apanage des biotechs les plus
connues.
-Guillaume Bayre, Agefi-Dow Jones; 01 41 27 47 93; gbayre@agefi.fr
ed: ECH
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June 22, 2018 08:09 ET (12:09 GMT)
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