La loi dite "Florange", qui instaure un système de droits de vote double de manière automatique pour les sociétés françaises cotées, est censée encourager l'actionnariat de long terme. En réalité, le texte de loi favorise en premier lieu son initiateur: l'Etat, qui va pouvoir céder des participations tout en gardant le même pouvoir d'influence. Au détriment des actionnaires minoritaires des entreprises à capitaux publics.



Adoptée l'année dernière, la loi Florange a instauré l'obtention de droits de vote double pour toute action détenue depuis deux ans à titre nominatif. La seule possibilité pour revenir au système "une action, un vote", est qu'une résolution en ce sens soit adoptée au deux-tiers par les actionnaires lors des assemblées générales.



C'est justement pour éviter l'adoption d'une telle résolution que l'Etat a récemment annoncé son renforcement au capital de Renault (RNO.FR). Pour cela, le gouvernement est allé jusqu'à utiliser, juste avant l'assemblée générale du constructeur automobile, un système de prêts et emprunts de titres, une méthode souvent critiquée par l'Autorité des marchés financiers (AMF).



La manoeuvre devrait néanmoins être efficace: Renault dispose d'une base actionnariale diversifiée, et le taux de participation aux assemblées du groupe est généralement faible. La participation élargie de l'Etat au capital devrait donc suffire à bloquer la résolution.



Minorité de blocage



L'Etat pourrait être tenté de procéder de la même manière chez Air France-KLM (AF.FR), selon Exane BNP Paribas. Le gouvernement français détient 15,9% du capital et des droits de vote de la compagnie aérienne, un niveau insuffisant pour éviter qu'une résolution en faveur du droit de vote unique ne soit adoptée lors de l'assemblée générale. Un renforcement opportun au capital, à l'image de l'opération sur Renault, n'est donc pas à écarter, estiment les analystes.



Chez GDF Suez (GSZ.FR), une résolution pour revenir au principe "une action, un vote" sera proposée lors de l'assemblée générale le 28 avril. Mais l'Etat, qui détient 33,2% du capital, possède une minorité de blocage et votera contre la résolution. Chez Orange (ORA.FR), EDF (EDF.FR) ou encore Aéroports de Paris (ADP)(ADP.FR), le gouvernement est d'ores et déjà assuré de l'application de la loi Florange.



Au final, l'Etat devrait donc obtenir sans trop de difficultés des droits de vote double dans toutes les sociétés dans lesquelles il est actionnaire. Dès lors, il aura la main libre pour procéder à des cessions de participations - il a déjà prévu de vendre entre 5 milliards et 10 milliards d'euros d'actifs d'ici la mi-2016 - tout en gardant son pouvoir de contrôle.



Aucun recours pour les autres actionnaires



Selon les calculs d'Exane, l'Etat pourrait céder entre 0,5% et 12% du capital des entreprises dans lesquelles il est présent, tout en gardant le même niveau d'influence lors des assemblées générales. Ces chiffres s'entendent dans l'hypothèse où les autres actionnaires importants obtiendraient également des droits de vote double.



Dans ce scénario, l'Etat pourrait céder 11,7% de GDF Suez, 10,7% d'Orange, 10% d'EDF ou encore plus de 6% dans Air France-KLM et Renault, en maintenant le même niveau de droits de vote.



De leur côté, les actionnaires minoritaires n'auront aucun recours et devront subir un risque de ventes massives de titres, de nature à peser sur le cours de l'action. Le renforcement d'un actionnaire, surtout celui de l'Etat, réduit aussi la possibilité d'une offre de rachat, et de la prime spéculative qui l'accompagne. Sans compter que les investisseurs étrangers, déjà méfiants vis-à-vis des sociétés où l'Etat est présent, seront d'autant plus frileux à investir.



Seule consolation, le retour de papier de l'Etat devrait pouvoir être facilement absorbé dans les conditions actuelles de marché, très favorables. L'impact sur les titres des sociétés concernées pourrait donc être limité. Quant à l'Etat, non content de conserver sa main-mise sur les groupes, il pourrait renflouer ses caisses à bon prix. De quoi gagner sur tous les tableaux.



-Blandine Hénault, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 53; blandine.henault@wsj.com (ed/EC)

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