Les droits de vote double favorisent l'Etat avant tout autre investisseur - DJ Plus
13 April 2015 - 1:50PM
Bourse Web Dow Jones (French)
La loi dite "Florange", qui instaure un système de droits de
vote double de manière automatique pour les sociétés françaises
cotées, est censée encourager l'actionnariat de long terme. En
réalité, le texte de loi favorise en premier lieu son initiateur:
l'Etat, qui va pouvoir céder des participations tout en gardant le
même pouvoir d'influence. Au détriment des actionnaires
minoritaires des entreprises à capitaux publics.
Adoptée l'année dernière, la loi Florange a instauré l'obtention de
droits de vote double pour toute action détenue depuis deux ans à
titre nominatif. La seule possibilité pour revenir au système "une
action, un vote", est qu'une résolution en ce sens soit adoptée au
deux-tiers par les actionnaires lors des assemblées générales.
C'est justement pour éviter l'adoption d'une telle résolution que
l'Etat a récemment annoncé son renforcement au capital de Renault
(RNO.FR). Pour cela, le gouvernement est allé jusqu'à utiliser,
juste avant l'assemblée générale du constructeur automobile, un
système de prêts et emprunts de titres, une méthode souvent
critiquée par l'Autorité des marchés financiers (AMF).
La manoeuvre devrait néanmoins être efficace: Renault dispose d'une
base actionnariale diversifiée, et le taux de participation aux
assemblées du groupe est généralement faible. La participation
élargie de l'Etat au capital devrait donc suffire à bloquer la
résolution.
Minorité de blocage
L'Etat pourrait être tenté de procéder de la même manière chez Air
France-KLM (AF.FR), selon Exane BNP Paribas. Le gouvernement
français détient 15,9% du capital et des droits de vote de la
compagnie aérienne, un niveau insuffisant pour éviter qu'une
résolution en faveur du droit de vote unique ne soit adoptée lors
de l'assemblée générale. Un renforcement opportun au capital, à
l'image de l'opération sur Renault, n'est donc pas à écarter,
estiment les analystes.
Chez GDF Suez (GSZ.FR), une résolution pour revenir au principe
"une action, un vote" sera proposée lors de l'assemblée générale le
28 avril. Mais l'Etat, qui détient 33,2% du capital, possède une
minorité de blocage et votera contre la résolution. Chez Orange
(ORA.FR), EDF (EDF.FR) ou encore Aéroports de Paris (ADP)(ADP.FR),
le gouvernement est d'ores et déjà assuré de l'application de la
loi Florange.
Au final, l'Etat devrait donc obtenir sans trop de difficultés des
droits de vote double dans toutes les sociétés dans lesquelles il
est actionnaire. Dès lors, il aura la main libre pour procéder à
des cessions de participations - il a déjà prévu de vendre entre 5
milliards et 10 milliards d'euros d'actifs d'ici la mi-2016 - tout
en gardant son pouvoir de contrôle.
Aucun recours pour les autres actionnaires
Selon les calculs d'Exane, l'Etat pourrait céder entre 0,5% et 12%
du capital des entreprises dans lesquelles il est présent, tout en
gardant le même niveau d'influence lors des assemblées générales.
Ces chiffres s'entendent dans l'hypothèse où les autres
actionnaires importants obtiendraient également des droits de vote
double.
Dans ce scénario, l'Etat pourrait céder 11,7% de GDF Suez, 10,7%
d'Orange, 10% d'EDF ou encore plus de 6% dans Air France-KLM et
Renault, en maintenant le même niveau de droits de vote.
De leur côté, les actionnaires minoritaires n'auront aucun recours
et devront subir un risque de ventes massives de titres, de nature
à peser sur le cours de l'action. Le renforcement d'un actionnaire,
surtout celui de l'Etat, réduit aussi la possibilité d'une offre de
rachat, et de la prime spéculative qui l'accompagne. Sans compter
que les investisseurs étrangers, déjà méfiants vis-à-vis des
sociétés où l'Etat est présent, seront d'autant plus frileux à
investir.
Seule consolation, le retour de papier de l'Etat devrait pouvoir
être facilement absorbé dans les conditions actuelles de marché,
très favorables. L'impact sur les titres des sociétés concernées
pourrait donc être limité. Quant à l'Etat, non content de conserver
sa main-mise sur les groupes, il pourrait renflouer ses caisses à
bon prix. De quoi gagner sur tous les tableaux.
-Blandine Hénault, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 53;
blandine.henault@wsj.com (ed/EC)
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