La saison 2015 des assemblées générales promet d'être chaude ! Cette année, les réunions annuelles des sociétés françaises cotées auront un enjeu tout particulier. Les actionnaires devront se prononcer sur l'instauration, ou non, d'un système de droits de vote double qui ne sera pas sans conséquence sur la gouvernance de certains groupes cotés.



Quelques explications s'imposent: en France, la loi dite "Florange", adoptée l'année dernière, a instauré de façon automatique l'obtention de droits de vote double pour toute action détenue depuis deux ans à titre nominatif. La seule possibilité pour revenir au système "une action, un vote", est qu'une résolution en ce sens soit adoptée au deux-tiers par les actionnaires lors des assemblées générales.



La période de détention des actions pour obtenir des droits de vote double débute à la date d'entrée en vigueur de la loi Florange, soit mars 2014. Cela signifie que les actionnaires présents au capital à titre nominatif obtiendront en mars 2016 leurs droits de vote double.



Ces investisseurs, qui auront gagné en influence sans avoir à augmenter leur participation, n'auront aucun intérêt à revenir en arrière. Pour les actionnaires opposés aux droits de vote double, les assemblées générales 2015 sont donc leur dernière chance d'éviter l'instauration d'un tel système de droits de vote.



Prendre le contrôle sans en payer le prix



Au yeux du gouvernement, l'instauration automatique de droits de vote double pour les actionnaires présents nommément au capital avait pour but d'encourager l'actionnariat de long terme. Les détracteurs des droits de vote double dénoncent pour leur part les effets pervers de ce système.



"Cela revient à donner trop de poids à certains actionnaires", explique Loïc Dessaint, directeur général de Proxinvest. "Avec les droits de vote double, un investisseur peut prendre le contrôle d'un groupe sans en payer le prix".



En soi, le système des droits de vote double n'est pas nouveau. Il existe en France depuis 1966. Au sein du SBF 120, 70 sociétés disposent déjà d'un système de droits de vote double, selon les calculs d'Exane BNP Paribas. Les 50 sociétés restantes ont pour la plupart prévu de présenter une résolution pour maintenir le système "une action, un vote". C'est le cas notamment de Renault (RNO.FR), Air Liquide (AI.FR), l'Oréal (OR.FR) ou encore d'Unibail-Rodamco (UL.AE).



La loi Florange n'annonce donc pas une révolution et ne va réellement concerner qu'un nombre limité de sociétés. Mais pour celles-ci, la question des droits de vote double revêt un enjeu d'importance dans la gouvernance à venir.



Vivendi, Eiffage et Numericable en ligne de mire



Si l'on exclut les sociétés à capitaux publics, seules trois sociétés n'ont pas proposé à leurs actionnaires une résolution pour maintenir le principe "un vote, une action". Il s'agit de Vivendi (VIV.FR), Eiffage (FGR.FR) et Numericable (NUM.FR).



Dans le cas de Vivendi, une résolution a néanmoins été déposée à la demande de certains actionnaires pour maintenir le système de droits de vote simple. Cette résolution n'a pas reçu le soutien du conseil de surveillande du groupe, présidé par Vincent Bolloré. L'instauration d'un droit de vote double chez Vivendi illustrerait, s'il le faut encore, la montée en puissance de l'homme d'affaires breton dans le groupe de média et de contenus.



Selon les calculs de Proxinvest, l'instauration des droits de vote double chez Vivendi devrait permettre à Vincent Bolloré de détenir dans un premier temps 18% des droits de vote du groupe. Cette proportion est appelée à augmenter avec la récente montée au capital de l'homme d'affaires breton.



Chez Eiffage, l'instauration des droits de vote double va encore renforcer le pouvoir des salariés, qui détiennent 28% du capital. Cela "constitue un outil anti-OPA très fort pour la direction", souligne Exane. Quant à Numericable, les droits de vote double pourraient permettre à la maison-mère Altice (ATC.AE) de céder des titres pour financer des acquisitions, tout en conservant le contrôle de sa filiale.



L'Etat, principal bénéficiaire des droits de vote double



Mais la loi Florange va surtout bénéficier à son initiateur: l'Etat français. Ce dernier a tout intérêt à voter en faveur de l'instauration de droits de vote double. Il pourra céder des participations - il a déjà prévu de vendre entre 5 milliards à 10 milliards d'euros d'actifs d'ici la mi 2016 - tout en maintenant son influence au capital des groupes cotés.



Pas étonnant dès lors que l'Etat soit allé jusqu'à augmenter sa participation, et donc ses droits de vote, dans Renault (RNO.FR) juste avant l'assemblée générale du constructeur automobile prévue le 30 avril. Cela lui offre plus de poids pour voter contre la résolution visant à maintenir un système de droits de vote simple.



De la même façon, l'Etat a fait pression dès juin 2014 sur Bouygues (EN.FR) pour rejeter une résolution visant à conserver les droits de vote simple chez Alstom (ALO.FR). L'Etat, qui doit reprendre la participation de 29% de Bouygues dans le groupe industriel, tient à asseoir son influence. Ces enjeux concernent aussi GDF Suez (GSZ.FR), EDF (EDF.FR), Aéroports de Paris (ADP.FR), Orange (ORA.FR) et Air France-KLM (AF.FR).



Nul doute que pour ces sociétés, les assemblées générales devraient être particulièrement animées cette année.



-Blandine Hénault, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 53; blandine.henault@wsj.com (ed/EC)



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